[VS3] Curiosité et Inspiration.

"La femme est la meilleure amie et la pire ennemie de l'homme.
Sa meilleure amie lorsqu'elle l'exhorte à développer ce qu'il a de plus noble en lui,
Sa pire ennemie lorsqu'elle le pousse à se vautrer dans ses bas instincts.
Sa meilleure amie lorsqu'elle lui donne des forces,
Sa pire ennemie lorsqu'elle lui vole son énergie.
Sa meilleure amie lorsqu'elle l'aime avec sincérité,
Sa pire ennemie lorsqu'elle s'aime à travers lui.

Demande-toi,
ô toi qui t'exerce à l'art difficile de la survie,
si la femme que tu tiens dans tes bras est ton amie ou ton ennemie."


Finissant de lire le 3e verset de la tablette, Eskarioth remballa cette dernière, l'air pensif :
"Si il y a bien une chose que je pensais ne jamais lire sur cette tablette... c'est bien ce genre de poésie !
Qu'est que la femme pour un combattant sinon une source infinie de complications ? Pour qu'il soit au maximum de ses capacités au plus fort de la bataille, il a tout intérêt à faire abstraction de ce genre de frivolités. Décidément, l'auteur de cette tablette était un bien curieux personnage !"

L'air était lourd et humide en cette fin d'après-midi à Asee Teph. Le sorcier maudissait ce climat. Non pas, parce qu'il ruisselait de sueur sous sa toge, mais parce que cette infernale humidité ne cessait jamais de faire couiner les articulations de ses prothèses. Il se remit en route, au rythme des "skouik" caoutchouteux réguliers.

"Pour la discrétion, on a déjà fait mieux. Tensess m'a à la bonne si je ne me fais pas repérer par une troupe de liguiers - ou pire - avec tout ce raffut..." marmonna-t'il.

Se faufilant à travers la végétation luxuriante de taillis en taillis, l'Arisen s'arrêta net lorsqu'il entendit un grognement interrogatif suivi d'un gargouillis. Levant les yeux en poussant un juron coloré bien senti, il se retrouva nez à nez avec un imposant troll portant une cicatrice sur l'oeil droit et ventripotent - il était de toute évidence bien nourri - commençant à baver, passant sa langue visqueuse sur ses lèvres gercées.
"Graaaourrrglglglg.... ?"

Ne lui laissant pas le temps de passer à l'étape suivante, un bloc de glace se forma instantanément sur la créature, arborant alors l'incompréhension sur son visage.
"Du calme, gros tas de graisse. Je gardais ce sort pour un kanien, mais le sort en a voulu autrement. Et puis je n'étais pas comestible de toute façon. Donc aujourd'hui ce sera régime pour toi."
Ne s'attardant pas dans le coin, Eskarioth s'éloigna rapidement, usant par moment de sa téléportation pour brouiller les pistes au cas où le troll aurait eu la volonté de le suivre une fois libéré.

L'Arisen s'arrêta à nouveau lorsqu'il entendit retentir non loin un "Plouf" sonore, provenant du lac qu'il avait commencé à longer. S'approchant de la rive, dissimulé à l'ombre des arbres gigantesques de l'endroit, il scruta la surface du lac, silencieux. S'attendant à voir ressurgir un crocodile ou une hydre - créatures qui pullulaient dans le coin - il s'apprêtait à faire demi-tour. Il s'immobilisa lorsqu'il vit non pas un reptile mais la tête d'une elfe ressortir de l'eau suivi de son buste. Si il n'avait pas eu son masque mortuaire, Eskarioth en aurait eu la bouche bée. Non pas parce que l'elfe était particulièrement belle, mais plutôt parce qu'elle avait l'inconscience de se baigner nue et désarmée dans un tel endroit...

Créant instinctivement une flèche astrale dans sa main, le sorcier s'apprêtait à éliminer cette folle sans plus attendre. Pourtant, il s'arrêta dans son élan. Aucun autre membre de l'Empire n'était visible dans les environs. Pourquoi alors appliquer une conduite qu'il désapprouvait ? Cette elfe n'était pas la cible de sa mission. Et si la guerre était nécessaire de son point de vue, les tueries sans raison et sans gloire ne faisaient pas partie de ses passe-temps favoris. La flèche astrale mourut dans la main du Zem. Une autre idée venait de germer dans son esprit : il s'était souvent demandé comment le prêtre félon, Ignatius le chagrin, avait pu se laisser séduire par une elfe. La curiosité l'emporta : il serait intéressant de voir comment cette elfe désarmée se sortirait de l'embarras si il l'attendait à proximité de ses affaires, qui ne devaient pas être bien loin. Essayerait-elle de l'amadouer par ses charmes ? Voilà qui promettait d'être amusant.

Il fallut à peine quelques minutes de fouille avant de trouver l'endroit où l'elfe avait déposé sa tenue et ses armes. Eskarioth s'installa non loin, assis sur un rocher, s'appuyant sur son baton, attendant sa proie. Cette dernière ne se fit pas trop attendre. Elle apparut une dizaine de minutes plus tard. Elle s'apprêta à ramasser ses vêtements lorsqu'elle aperçut l'Arisen. Se redressant, elle lui fit face, posant une main sur sa hanche, d'un air légèrement provocateur.



Contrairement aux stars "d'oreilles pointues", cette elfe n'avait rien de vulgaire ni d'obscène dans son attitude. Elle avait du cran, le sorcier lui reconnaissait bien ça. Il s'attendait à ce qu'elle le supplie ou qu'elle prenne une posture lascive... Mais pas qu'elle lui tienne tête comme si de rien n'était. Il pensa un moment à la réaction qu'auraient eu les prêtres bigots de l'inquisition xadaganienne face à une telle scène. Ils auraient certainement vociférer des insultes, verts de rage : "Corruptrice ! Monstruosité ! Brûlons cette... cette catin de la Ligue !" et autres joyeusetés. Ces images le firent sourire.

Prenant cela probablement comme une invitation, l'elfe toujours plus audacieuse s'approcha de l'Arisen. Elle tendit le bras, dans le but de toucher le masque mortuaire d'Eskarioth. Ce dernier intercepta la main délicate au vol. Il était curieux, certes. Mais pas téméraire. Et même si il était impressionné par l'aplomb de cette femme, il n'en restait pas moins méfiant. Il pensa un moment broyer cette main qu'il tenait dans sa poigne de fer : Elle aurait été impuissante, à sa merci. Il chassa cependant l'idée de son esprit. Relâchant doucement son étreinte, l'elfe retira sa main, faisant un pas en arrière. Elle gonflât ses joues, l'air un peu dépitée par la tournure des évènements, haussa les épaules et tourna les talons, et commença à se rhabiller en ignorant superbement son observateur. D'après son acoutrement, c'était une magicienne elle aussi. Une fois qu'elle fut parée, elle se retourna une dernière fois vers Eskarioth, lui souriant tout en lui faisant un signe d'adieu, puis elle s'éloigna à grande vitesse, volant en touchant à peine le sol.

Eskarioth resta un instant interdit, clignant des yeux. Il se sentait tout à coup un peu stupide. Lui avait-elle jeté un sort ? Ou était-ce juste sa curiosité qui l'avait amené à cette situation irréelle, ayant un je-ne-sais-quoi d'humiliant ? Murmurant un juron envers la gente féminine elfique, il se dit que la fatigue de la journée avait dû aussi jouer. Il valait mieux pour lui de rentrer au campement central impérial...

(...)

Le lendemain, l'Arisen repartit en chasse. Cette fois, l'officier du camp lui avait donné une mission bien précise : éliminer un Liguier qui placardait furtivement, à la faveur de la nuit, des affichs de propagande liguière sur les murs du camp. Après avoir recoupé les données de nombreux informateurs, il apparaissait clairement que le trublion avait établi son point de ralliement à la frontière du coin sauvage, le territoire des trolls...

"Merveilleux..."

Après quelques heures de marche, et quelques autres à quadriller le secteur, le sorcier trouva enfin le gîte du Liguier. Invoquant une boule de feu, il était prêt à déchainer un déluge brûlant sur l'homme en train de préparer visiblement un repas. Lorsqu'une silhouette se mit en travers de sa trajectoire : Il n'eut aucun mal à reconnaitre l'elfe de la veille, qui le toisait cette fois d'un regard sévère. Voilà qui s'annonçait intéressant. Saluant l'elfe d'une révérence, Eskarioth relâcha dans la foulée sa boule de feu dans sa direction. Cette dernière en sortit visiblement indemne, ses ailes grésillant très légèrement. Elle riposta par une comète de givre... que le Zem se serait pris s'il n'avait pas eu la présence d'esprit de se téléporter au dernier moment.

Le combat se déroula ainsi durant plusieurs minutes, prenant des allures de ballet surréaliste. Alors que les deux protagonistes semblaient plus vivre que l'instant présent, complètement absorbé par leur duel endiablé, un grognement - trop familier - se fit entendre. Eskarioth fronça les sourcils lorsqu'il vit le troll à la cicatrice bondir d'une promontoire en surplomb avec la visible intention d'atterrir juste derrière l'elfe.

"Ha non... Toi, tu as la fâcheuse manie de venir à l'endroit et au moment où il ne faut pas. Désolé, mais celle-ci non plus n'est pas pour toi !"

"Graaaouurrrgllgllluuuuu ?!...."

Avant que le troll ait pu se réceptionner, un tombeau de glace se referma sur lui, le faisant rebondir et poursuivre sa trajectoire sur une pente bien nivelée. L'expression suppliante qu'il avait sur le visage avant que son glaçon ne le fasse disparaitre dans une fosse boueuse rendit la situation presque comique. Eskarioth en aurait rit si une flux de glace ne l'avait pas atteint au même moment en pleine poitrine, lui coupant un instant le souffle. Grognant de douleur, le sorcier reforma prestement une barrière élémentaire autour de lui.

Le combat se poursuivit, et le Zem perdit la notion du temps... avant de finalement s'apercevoir qu'il avait reculé de plusieurs kilomètres à travers la jungle. L'elfe avait le dessus : Sa maitrise de la magie était plus grande et ses enchainements de sorts plus fluides que les siens. Sentant une certaine jalousie le gagner, Eskarioth redoubla d'efforts pour mettre un terme à ce duel qui n'avait que trop duré : il incanta rageusement trait de feu après trait de feu... Jusqu'au moment où il perdit pied.

Une racine.
Une bête racine venait de le faire trébucher et le voilà en train de dévaler la pente à la manière d'un rondin de bois. Le choc en bas fut rude. Aussi bien pour son corps que pour son orgueil : Il fallait se rendre à l'évidence. Il avait bel et bien perdu ce combat. Et il y avait fort à parier qu'il allait bientôt y perdre la vie également, essayant de se relever péniblement, pour faire face à son assaillante, il fut surpris de la voir en surplomb souriante et visiblement satisfaite. Elle lui fit une révérence, suivi d'un clin d'oeil, avant de disparaitre dans les hauteurs.

Eskarioth resta quelques instants à genoux, dégoulinant de boue dans laquelle il s'était vautré à l'atterrissage. Curieusement, la jalousie et la colère avaient fait place à une certaine sérénité. Pour la première fois depuis aussi loin qu'il se souvienne, il avait pris un réel plaisir dans cette bataille. Non pas avec l'intention de tuer son opposante, mais juste remporter la compétition implicite que cela impliquait. Pour la première fois également, quelqu'un venait de lui donner envie de s'améliorer non pas pour le bien de l'Empire... mais pour son propre épanouissement : Le plaisir qu'il avait à manipuler la magie était indéniable. Et il y avait fort à parier que la chose était aussi vraie pour cette elfe.

Ressortant la tablette de ses affaires, essuyant grossièrement la boue qu'il y avait dessus, le sorcier fixa à nouveau le troisième verset, en souriant :

"Désolé cher auteur, mais je crains que l'on ne puisse cerner la femme en parlant simplement d'ombre et de lumière. Elle est parfois tellement plus que cela. Sans être vraiment amie ou ennemie du combattant, il arrive parfois qu'elle devienne... sa muse."

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